Un passeport numérique pour les produits de luxe : cap sur une consommation responsable en Europe 

 

 

| Propriété Intellectuelle |

 

Nathalie Moullé-Berteaux, Luxus Plus, le 21 juin 2024

 

Un projet européen de passeport numérique des produits (DPP) est à l’étude afin de garantir traçabilité, transparence et authenticité des produits commercialisés au sein des 27 pays membres. Avocate associée auprès du Cabinet HERALD (anciennement Granrut), Nathalie Moullé-Berteaux revient sur l’impact d’un tel projet pour l’industrie du luxe.

 

 

Propos liminaires : C’est une interview du 7 décembre 2023 de Frédéric Montagnon (co-fondateur d’Arianee) pour LUXUS PLUS qui m’a donné envie d’en savoir davantage sur le passeport numérique des produits ou Digital Product Passport (« DPP ») : en comprendre la raison d’être en premier lieu, et avec elle, le rôle d’instances européennes au cœur de l’actualité électorale (I), et enfin, en analyser les impacts pour les marques de luxe auxquelles j’ai consacré la majeure partie de ma carrière professionnelle dans le domaine du droit de la propriété intellectuelle (II).

 

Aux origines du DPP

 

Le Pacte Vert : présenté par la Commission européenne le 11 décembre 2019, approuvé à une large majorité par le Parlement européen le 15 janvier 2020, il est doté d’un budget de 503 milliards d’euros d’investissements et vise à transformer significativement l’économie de l’Union européenne pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Ursula von der Leyen, cheffe de l’exécutif européen depuis 2019, a défini le Green Deal comme la nouvelle stratégie de croissance de l’UE et en a fait la priorité numéro un de son mandat, exigeant que toutes les actions et politiques européennes contribuent à atteindre ses objectifs.

 

L’alignement à l’objectif de neutralité climatique est inscrit dans la loi européenne sur le climat (1), qui établit un conseil scientifique consultatif composé d’experts chargés d’évaluer la conformité de toutes les propositions législatives européennes avec les objectifs de l’Accord de Paris de 2015 (2) et la stratégie environnementale de l’UE.

 

Dans ce contexte, la Commission européenne a avancé le 30 mars 2022 une série de propositions législatives qui s’orientent vers la promotion de la durabilité, de l’économie circulaire et de l’efficacité énergétique des produits tout au long de leur cycle de vie. Parmi ces propositions de la Commission européenne, figurait la proposition de règlement ESPR sur l’écoconception pour des produits durables (Ecodesign for Sustainable Products Regulation) (3). Son pilier est le certificat numérique, donnant naissance au passeport numérique des produits (ou « DPP »), qui vise à garantir traçabilité, transparence et authenticité.

 

Le règlement ESPR a été adopté le 23 avril 2024 par le Parlement européen et le 27 mai dernier par le Conseil. Il soumet à l’existence d’un DDP la mise sur le marché de l’UE de l’ensemble des produits couverts par le règlement ESPR, dont la liste n’est pas arrêtée à date par la Commission mais qui vise d’ores et déjà quatre secteurs prioritaires : les batteries, le textile, l’électronique et la construction. Concernant le secteur de l’habillement, un déploiement du passeport numérique des produits est envisagé d’ici 2026.

 

Quel impact pour les marques de luxe ?

 

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1 –  Règlement (UE) 2021/1119 du Parlement Européen et du Conseil du 30 Juin 2021.

2 –  Cf. Traité international adopté par consensus par 197 parties le 12 décembre 2015 lors de la COP 21 dans le cade de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), entré en vigueur le 4 novembre 2016.

3 –  Proposition de Règlement du Parlement Européen et du Conseil COM (2022) 142 final 2022/0095(COD) du 30 mars 2022 établissant un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception applicables aux produits durables